L’auteur réunionnais, Mickaël JORON, intègre la bibliothèque du Congrès Américain
Par LEMBA MASSENGO
« Anecdotes illustrées du mysticisme réunionnais – mémoire endémique de la Réunion des esprits », le 2ème ouvrage de Mickaël JORON, jeune auteur réunionnais est entré dans le catalogue de la Bibliothèque du Congrès américain, ‘The Library of Congress’.
The Library of Congress, institution culturelle fédérale par excellence, est également la plus ancienne bibliothèque des États-Unis d’Amérique. Fondée en 1800 par le président John Adams, elle s’étend sur Capitol Hill à Washington, avec ses trois bâtiments principaux. En outre, ses plus de 170 millions d’articles, 39 millions de livres catalogués et autres 1350 kilomètres de rayonnages lui confèrent le titre de plus grande bibliothèque au monde.

Crédits photo Wikipedia
C’est sous l’ère de Carla HAIDEN, 14e bibliothécaire du congrès et première femme africaine-américaine à accéder à ce poste que le 2ème ouvrage de Mickaël JORON est référencé. Cette proche de Barack Obama, entrée en fonction le 14 septembre 2016 et classée la même année par le magazine ‘FORTUNE’ parmi les « 50 plus grands leaders du monde » (reconnue pour son « leadership visionnaire »), n’a de cesse d’œuvrer à ce que « la bibliothèque préserve et donne accès à une source de connaissances riche, diversifiée et durable » (confère message officiel de bienvenue de Carla HAIDEN Librarian of Congress, site officiel).
Pourquoi une telle mise en lumière ?
Interrogé au sujet de sa mise en lumière sur le plateau du 12H30 & VOUS, d’Antenne Réunion, l’auteur saint-louisien explique que ceci est probablament dû « à la rareté du sujet » qui, de surcroît, est rarement illustré. En effet, initialement abordé de manière ésotérique, le sujet du mysticisme est désormais vu sous un angle culturel ; ce qui lui permet de prendre pleinement part au patrimoine culturel mondial. Son étude rentre donc dans une nouvelle ère où mysticisme et animisme forment un ensemble prenant part à « THE AFRICAN ANCESTORS LEGACY », intéressant les ethnologues, les chercheurs, les historiens sans oublier les libraires du monde entier. L’imaginaire étant perçu, ici, comme une richesse culturelle.
Contacté par téléphone dans le cadre d’une interview pour BY US MEDIA, Mickaël JORON se livre sans réserve…
The Library of Congress est l’organe de recherche du Congrès américain. Comment vivez-vous le fait que vos écrits servent non seulement « à la promotion du progrès de la connaissance » mais également aux représentants politiques des EUA afin qu’ils puissent remplir « leurs fonctions constitutionnelles » ?
« C’est un honneur d’avoir une éventuelle opportunité d’influencer les femmes et les hommes de décision qui siègent au Congrès américain.
Mon livre y est présent et représente l’état d’esprit réunionnais. Sans oublier que la bibliothèque est ouverte également au public (chercheurs, universitaires…) Qui sait ? Peut-être que notre paradigme inspirera un des leaders demain ».

paru en 2018 chez EDILIVRE
Votre œuvre qui est officiellement entrée dans le patrimoine mémoriel planétaire, figure aux côtés de « trésors inestimables » tels que Le Sûtra bouddhiste datant de 770 (le plus ancien livre imprimé du catalogue), La Bible de Gutenberg, premier livre imprimé en Europe en 1455, à l’aide de caractères mobiles (il n’en existe que 3 exemplaires dans le monde en « parfait vélin* ») ou encore l’Encyclopédie de Diderot… Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
« Cela me réjouit bien-sûr mais il faut savoir que je suis autant un écrivain qu’un outil entre les mains de l’univers. En mon for intérieur d’animiste convaincu, je sentais que ma mission sur Terre allait dans ce sens. La reconnaissance mondiale, c’est très bien mais je n’oublie pas que la volonté divine et les décisions des LWA (Orishas, ancêtres) m’ont emmené à ce résultat. Il aura fallu faire preuve de résilience, d’humilité, de foi et d’amour pour accéder à la réalisation de ce que je vis actuellement.
Je pense également à l’apport de mes frères et sœurs africains-américains dans cette reconnaissance. Tout cela participe également à prouver, si besoin était, que nos ancêtres et notre continent sont, en tout temps, et par tous les biais entrés dans l’Histoire. »
En cette fin de mois de l’histoire de l’Afrique et de ses diasporas, ZOOM sur ce jeune artiste multidimensionnel que tout ou presque prédestinait à cette reconnaissance mondiale
Mickael JORON est un auteur-compositeur-interprète, dessinateur de bandes dessinées et réalisateur de courts métrages animés.
Né le 6 avril 1987, au sein d’un clan familial composé de plusieurs générations d’artistes, activistes, éducateurs et par ailleurs, fondateurs des groupes Ousanousava et Baster (les JORON du côté de son père et les GAULIRIS du côté de sa mère) ; c’est tout naturellement que Mickaël s’intéresse aux arts, guidé par l’aura ainsi que les succès familiaux des deux groupes qu’il cotôyait de près dès sa plus tendre enfance.
Après s’être essayé à la musique, notamment avec un album sorti en 2012, intitulé ‘ABCD’, (signé dans la maison de production de son cousin, Thierry Gauliris Productions), c’est dans une toute autre forme d’art que Michael JORON prend son envol.

Le jeune homme se lance d’abord dans la BD numérique avec son premier projet ‘TI BAD’, en créant à la fois un style littéraire bien à lui, teinté d’humour noir, de foutan et d’ironie ainsi qu’un style graphique arrondi qu’il nomme le “TI KOMIKRÉNYONÉ”. Puis, vient le temps pour lui de ses premiers pas dans le monde de l’édition, cela se fera avec « Kamal » paru en 2016.
En 2017, après avoir réalisé une première série animée sur le marronnage réunionnais qu’il diffuse sur YOUTUBE, Mickaël enchaîne avec des films d’animations sur le Moringue et Edmond ALBIUS, célèbre réunionnais à l’origine de la pollinisation de la vanille. Il obtient peu à peu la reconnaissance en tant que réalisateur de courts-métrages d’animation. La même année, son second ouvrage « Anecdotes illustrées du mysticisme réunionnais » paraît et connaît un succès d’estime. Son 3e ouvrage « Mafia créole – Psyché d’un criminel néronien » sorti en 2018, est un roman, un thriller psychologique qui prend d’assaut les étagères internationales (distribué au Japon au KINOKUNIYA shop de Tokyo en Angleterre via Amazon UK et en Espagne). À noter que « Mafia Créole » qui a tapé dans l’œil d’étudiants de Nottingham, est choisi comme sujet d’étude pour être traduit en slang Jamaïcain.
Au début de l’année 2019, Mickaël JORON et ses acolytes de la KOZ KAF fondent l’association L.O.A : Leaders Of Africa (sigle directement inspiré des Orishas appelés LWA dans le vaudou haïtien) dont les objectifs sont de s’étendre partout en Afrique australe, afin de partager les cultures communes et travailler ensemble sur le plan économique.
L’efficience de son lobbying permet au L.O.A de tisser des liens étroits avec le gouvernement mozambicain tant et si bien que cette success story économique mériterait un article à elle seule…
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Au travers de différentes interviews, Mickael JORON nous explique que ce recueil (ndrl: Anecdotes illustrées) est le fruit d’un long travail de recherche et de documentation s’inspirant des travaux de l’écrivain Eugène DAYOT ou encore de l’historien Prospère ÈVE, tout en tirant sa source des discussions familiales qu’il avait avec ses parents et ses grands-parents lorsqu’il était encore enfant : se souvenant avec nostalgie du moment privilégié où, au retour de l’école, son père éteignait la télévision afin que tous puissent se raconter leurs journées respectives…
À l’heure où les écrans font partie du quotidien des plus jeunes, pensez-vous que votre exemple puisse servir à promouvoir la tradition orale comme moyen de lutte contre la cyberaddiction des pré-ados et des ados ?
« La transmission est le cœur de mon travail. Qu’elle soit écrite ou orale, l’important c’est la vibration énergétique, l’onde qui passe de la bouche à l’oreille.
Oui, les générations d’aujourd’hui sont connectés à la technologie comme jamais auparavant. De ce fait, c’est à nous de nous en servir. C’est aussi pour cela que j’ai investi YOUTUBE. Par le biais de cette plateforme, de cette nouvelle technologie, je deviens aussi un griot des temps modernes car dans les faits, un objet, une technologie ne sont ni bonnes, ni mauvaises, tout dépend de l’énergie que nous, humains, y insufflons. Ce qui est déterminant c’est ce que l’on décide d’en faire. Une question reste néanmoins en suspens, allons-nous élever les esprits de la connaissance, de la motivation où vampiriser les énergies avec notre toxicité ?
Concernant la problématique spécifique de la cyberaddiction qui découle d’une volonté de couper toute communication avec son entourage, il s’agit d’une forme d’enfermement. Il me semble que la clef réside dans le fait de retrouver goût à cet échange. Ainsi, l’oralité véhiculant des valeurs de partage et d’interaction qui plus est, face à un intervenant qui ressemble au jeune, qui est à son écoute, a le pouvoir d’amener l’adolescent à se reconnecter avec lui-même et avec sa tradition ».
MJ, diriez-vous qu’en 2021, en pleine pandémie de COVID-19, connaître ses racines, être fier de sa culture, c’est « bankable » ?
« Rire… Pour moi qui vis en Afrique australe, il n’y a rien de plus normal qu’être connecté, plongé dans ses racines. La tradition, la culture, le spirituel, le mysticisme sont bien vivaces à la Réunion, avec ou sans crise.
Le réunionnais est un individu, qui est élevé dès le plus jeune âge à comprendre l’influence de l’invisible sur le visible. Du reste, quand la crise sanitaire a éclaté, j’étais entre 2 mondes, sur mon lit, atteint d’une dingue tropicale très sévère qui a failli m’emporter… Cependant, il en a été décidé autrement afin que j’achève, ici, ma mission. C’est justement cette connexion avec mes racines et ma culture animiste qui m’a permis de comprendre ce qui arrive au monde actuellement. Au-delà d’un effet « bankable », celui qui “à l’heure actuelle” n’est pas tourné vers ses ancêtres, vers la nature ou l’univers risque d’être bloqué dans le matériel et devenir insensé. La matière a des limites que l’esprit dépasse aisément. Si l’on vit cette crise, c’est aussi pour nous ramener à l’essentiel. Les LWA ont décidé de nous envoyer un message : nous, petits humains du haut de notre égo, nous ne sommes rien du tout, la nature nous dépassera toujours. Du coup « bankable » ou pas, souhaitons que le message passe car, si l’homme n’apprend pas par la sagesse, il apprendra par la souffrance. »
Les dates clés de son parcours…
- 2000 : Alors âgé de 13 ans, Mickaël part en voyage en Afrique du Sud où il se lie d’amitié avec des adolescents de la jeunesse ANC de Nelson MANDELA. Il prendra ce voyage comme un pèlerinage sur la terre de ses ancêtres.
- Février 2012 : Les émeutes généralisées, à la Réunion, le décide à former avec son cousin Cédric SALVAT, la KOZ KAF, une fraternité activiste. C’est ainsi que la démarche est lancée par 15 jeunes afro-descendants venus des quartiers populaires réunionnais fatigués du cercle vicieux de la violence, dans l’optique de s’organiser afin d’influer sur leur société locale. En revisitant l’histoire du marronnage, dans l’objectif de retrouver leur dignité et la fierté d’eux-mêmes, ils choisissent alors des noms de Rois et de Reines marrons qui ont vécu dans les montagnes.

- 21 mars 2018 : En visite chez une amie journaliste pour lui remettre en main propre son troisième ouvrage “Mafia Créole”, Mickaël JORON rencontre Stanley G. LEWIS, membre des Black Panthers de Los Angeles, écrivain et réalisateur. S’en suit un bel échange autour de la création artistique : films d’animation et livres.

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*« parfait vélin » : peau parfaite de vélot (veau mort-né), très fine, apparu à la fin du moyen-âge par les calligraphes, les miniaturistes et les relieurs pour sa douceur sa finesse le vélin est une spécialité
