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Anjouan, île martyre de la migration de masse vers Mayotte

par BY

28 mars 2018

D’Origine Comorienne, l’auteur de cette tribune, né à Madagascar a effectué une grande partie de ses études en France, ponctuée par un Doctorat de Génie Electrique. Enseignant, Entrepreneur et également Consultant dans les nouvelles technologies, il est en outre passionné par son continent, l’Afrique ainsi que par des questions de développements et de la lutte contre les inégalités.


Je déclare toute ma compassion à l’Île d’Anjouan, une Île martyre de la migration et des expulsés de masse avec toutes ses conséquences sociologiques et déshumanisantes [1]. Une Île où chaque famille a connu un.e expulsé.e qui a vu la mort en face. Une île où la femme pleure ses enfants laissés dans les bidonvilles de Mayotte. Une îles de la veuve qui aussi pleure son enfant, sa petite fille, sa nièce ou son neveux morts dans le bras de la mer agitée, entre l’île d’Anjouan et l’île de Mayotte, enclave française départementalisée. Anjouan, une île où le rapport à la vie comme à la mort demeure complexe pour les élites bien pensantes. Enfin, une Île vouée au mépris d’une élite politique mahoraise.

Tant de souffrance qui sépare deux îles sœurs, Anjouan et Mayotte, avec plus de 10 000 morts depuis l’instauration du visa-Balladur [2], cela, sur un bras de mer d’à peine 75 Kilomètres; plus de 133 morts/km, pour une population totale de 795 601 habitants (2016).

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L’horreur d’un record funèbre détenu par les îles au parfum prétendument paradisiaques, et qui aurait pu être évité ! Car il faut bien comprendre qu’il s’agit de l’échec global d’une élite régionale : Grande Comores, Mohéli, Anjouan et Mayotte. Échec qui incombe également aux Franco-comoriens qui n’ont pas su informer les élites politiques de la France métropolitaine des réalités de ces quatre îles (voir vidéo ci-dessous).

Cette élite embourgeoisée, déconnectée des enjeux régionaux géostratégiques, se soucie peu des souffrances qu’endurent les habitants de l’île d’Anjouan, souffrances dues à un déséquilibre géostratégique d’une occupation contestable [3].

En effet, l’Île possède le taux le plus élevé de migration au monde, avec pour conséquence, des dizaines de milliers de morts, et par ailleurs, des expulsés dont la plupart des enfants sont laissés à Mayotte. Sans parler des cadavres en état de décomposition ou à moitié dévorés par les poissons, retrouvés dans les filets des pêcheurs ou sur les plages d’Anjouan, données qui font que le rapport à la vie et à la mort y est de fait complètement chamboulé !

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Comment expliquer à cette population dont une grande majorité a été victime d’une expulsion contraire au droit international (avec le plus fort taux d’expulsion de population d’un territoire au monde) que les élites des quatre îles et leurs institutions, œuvrent avant tout pour elle? Des élites et des institutions qui entretiennent des rapports plus que douteux et qui peinent à communiquer clairement sur les objectifs qu’elles se sont fixées avec les autorités de la métropole. Une élite politique qui décrédibilise toute action sincère en faveur d’une normalisation dans la région, à savoir : mettre une pression aux exécutifs régionaux et celui de la métropole dans le but d’émettre des signaux clairs à la population.

En réalité, le seul acte, cadeau empoisonné, que ces élites ont posé, c’est de livrer Anjouan aux passeurs, au populisme et à la démagogie durant les périodes électorales à Mayotte [4].

Les violences que nous avons vues dans la crise mahoraise, ne sont donc que le reflet de la psychologie de l’Élite et des responsables qui gouvernent dans la région; l’image de violences politiques et de marchands de mort plane désormais; le subconscient de nos élites est transposé dans ses actes violents, avec pour résultat, des populations éloignées des réalités régionales.

Je déclare encore une fois toute ma compassion à l’île d’Anjouan, une île martyre de la migration et des expulsés de masse avec toutes les conséquences sociologiques qui en découlent, une île dont le rapport à la vie et à la mort nous échappent inexorablement…

[1] https://comoressentiel.wordpress.com/…/traversee-de-mayott…/
[2] Visa Balladur : http://www.altermondes.org/visa-balladur-le-drame-invisibl…/
[3] http://lesactualitesdudroit.20minutes-blogs.fr/…/la-france-…
[4] https://humanite.fr/mayotte-lagon-de-la-xenophobie-605814